Le cannabidiol (CBD) émerge aujourd'hui comme une molécule aux multiples facettes thérapeutiques, suscitant un intérêt grandissant tant dans la communauté scientifique que chez les patients à la recherche d'alternatives naturelles. Issu de la plante Cannabis sativa, ce cannabinoïde non-psychoactif se distingue par son absence d'effets euphorisants contrairement au THC (tétrahydrocannabinol). Les recherches récentes révèlent un potentiel thérapeutique remarquable pour diverses affections allant des troubles neurologiques aux problèmes inflammatoires, en passant par les désordres psychiques. Face à l'explosion de produits à base de CBD sur le marché, il devient crucial de comprendre les mécanismes d'action de cette molécule et d'examiner les preuves scientifiques qui étayent ses bienfaits thérapeutiques. Cet approfondissement permet non seulement d'éclairer les patients, mais aussi d'orienter les professionnels de santé dans leurs recommandations thérapeutiques.
La science du cannabidiol : mécanismes d'action dans le corps humain
Le CBD interagit avec notre organisme de façon complexe et multidimensionnelle. Contrairement à de nombreux médicaments qui ciblent un récepteur spécifique, le cannabidiol présente une activité pharmacologique sur plusieurs systèmes simultanément. Cette polyvalence explique son large spectre d'effets thérapeutiques potentiels. Les recherches actuelles démontrent que le CBD module non seulement notre système endocannabinoïde endogène, mais influence également d'autres récepteurs et voies de signalisation cellulaire cruciaux pour maintenir l'homéostasie du corps humain.
Les effets du CBD résultent principalement d'interactions complexes entre différents mécanismes neurobiologiques. En modulant des récepteurs variés, cette molécule peut influencer la transmission nerveuse, atténuer les processus inflammatoires et réguler les réponses immunitaires. La compréhension approfondie de ces mécanismes constitue la base scientifique expliquant pourquoi le CBD pourrait s'avérer bénéfique dans un large éventail de conditions médicales.
Interaction du CBD avec le système endocannabinoïde et les récepteurs CB1/CB2
Le système endocannabinoïde (SEC) représente un réseau de signalisation cellulaire présent dans tout l'organisme. Il comprend des endocannabinoïdes (principalement l'anandamide et le 2-AG), des récepteurs cannabinoïdes (CB1 et CB2) et des enzymes responsables de leur synthèse et dégradation. Contrairement au THC qui se lie directement aux récepteurs CB1 et CB2, le CBD présente une affinité relativement faible pour ces récepteurs. Son mode d'action principal consiste à inhiber l'enzyme FAAH (Fatty Acid Amide Hydrolase) qui dégrade l'anandamide, entraînant ainsi une augmentation des niveaux d'endocannabinoïdes naturels.
Les récepteurs CB1 sont principalement localisés dans le système nerveux central, tandis que les récepteurs CB2 se trouvent majoritairement dans les cellules immunitaires et périphériques. Le CBD module indirectement l'activité de ces récepteurs, ce qui explique ses effets sur la douleur, l'inflammation et les fonctions cognitives. De plus, le cannabidiol interagit avec d'autres cibles moléculaires, notamment les récepteurs sérotoninergiques 5-HT1A, expliquant ses propriétés anxiolytiques, et les récepteurs vanilloïdes TRPV1, impliqués dans la perception de la douleur et de la température.
Effet entourage : synergie du CBD avec les terpènes et flavonoïdes
L'effet entourage désigne le phénomène par lequel les différents composés du cannabis agissent en synergie pour produire des effets thérapeutiques supérieurs à ceux de chaque composé isolé. Dans la plante de cannabis, le CBD coexiste naturellement avec plus de 100 autres cannabinoïdes, ainsi qu'avec des terpènes aromatiques et des flavonoïdes. Ces molécules interagissent entre elles, modulant et amplifiant leurs effets respectifs. Par exemple, le terpène myrcène potentialise les effets sédatifs, tandis que le limonène pourrait contribuer aux propriétés antidépressives.
Cette synergie biochimique explique pourquoi certains produits à spectre complet (contenant tous les composés naturellement présents dans la plante) peuvent offrir des bénéfices thérapeutiques plus importants que le CBD isolé. Les flavonoïdes présents dans le cannabis possèdent également des propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires qui complètent l'action du CBD. Ce concept d'effet entourage guide aujourd'hui de nombreux développements pharmaceutiques cherchant à optimiser les formulations à base de cannabinoïdes.
Biodisponibilité et métabolisme du CBD selon les modes d'administration
La biodisponibilité du CBD varie considérablement selon son mode d'administration, un facteur déterminant pour son efficacité thérapeutique. L'administration orale traditionnelle (gélules, huiles ingérées) présente une biodisponibilité relativement faible (6-19%) en raison de l'effet de premier passage hépatique. Le CBD subit une métabolisation extensive dans le foie par les enzymes du cytochrome P450, particulièrement le CYP3A4 et le CYP2C19, générant plus de 100 métabolites dont certains conservent une activité biologique.
L'administration sublinguale (huiles placées sous la langue) améliore la biodisponibilité en contournant partiellement ce premier passage hépatique. L'absorption via la muqueuse buccale permet une entrée directe dans la circulation sanguine, avec une biodisponibilité estimée entre 13% et 35%. L'inhalation (vaporisation) offre la biodisponibilité la plus élevée (jusqu'à 56%) et l'action la plus rapide, les effets se manifestant en quelques minutes. Les formulations topiques (crèmes, baumes) présentent une absorption systémique limitée mais permettent une action localisée, particulièrement utile pour les affections cutanées et les douleurs musculo-squelettiques.
La pharmacocinétique du CBD représente un domaine d'étude fondamental pour développer des formulations thérapeutiques optimales. Les nouvelles technologies d'encapsulation, comme les liposomes et les nanoémulsions, visent à surmonter les limites de biodisponibilité du CBD, notamment sa faible solubilité dans l'eau.
Différences pharmacologiques entre CBD isolat, broad spectrum et full spectrum
Les produits à base de CBD se répartissent principalement en trois catégories, chacune présentant un profil pharmacologique distinct. Le CBD isolat
contient exclusivement la molécule de cannabidiol purifiée (généralement >99%), sans autres cannabinoïdes, terpènes ou composés végétaux. Cette forme offre une expérience standardisée et prévisible, particulièrement adaptée aux études cliniques et aux patients souhaitant éviter toute trace de THC. Cependant, elle ne bénéficie pas de l'effet entourage.
Les produits broad spectrum
(spectre large) contiennent le CBD ainsi que d'autres cannabinoïdes, terpènes et flavonoïdes naturellement présents dans la plante, à l'exception du THC qui est éliminé lors du processus d'extraction. Cette formulation préserve une partie de l'effet entourage tout en évitant les effets psychoactifs potentiels ou les complications légales liées au THC. Enfin, les produits full spectrum
(spectre complet) incluent l'ensemble des composés naturellement présents dans la plante, y compris des traces de THC (moins de 0,3% en Europe). Cette catégorie maximise l'effet entourage et offre potentiellement les bénéfices thérapeutiques les plus complets.
Potentiel thérapeutique du CBD dans les troubles neurologiques
Le système nerveux central, avec sa forte concentration en récepteurs endocannabinoïdes, représente une cible privilégiée pour les effets thérapeutiques du CBD. Les propriétés neuroprotectrices et anticonvulsivantes du cannabidiol en font un candidat prometteur pour diverses affections neurologiques. Les recherches actuelles explorent son potentiel dans le traitement de pathologies comme l'épilepsie réfractaire, la maladie de Parkinson, la sclérose en plaques ou encore les troubles du spectre autistique.
La capacité du CBD à moduler la transmission nerveuse, réduire le stress oxydatif neuronal et atténuer la neuroinflammation sous-tend son potentiel thérapeutique dans ces troubles. Des études précliniques montrent que le cannabidiol peut protéger les neurones contre diverses agressions, notamment l'excitotoxicité glutamatergique et le stress oxydatif, deux mécanismes impliqués dans de nombreuses maladies neurodégénératives. Cette polyvalence d'action neurologique explique l'intérêt croissant de la communauté médicale pour cette molécule dans le domaine neurologique.
Traitement de l'épilepsie réfractaire : cas d'epidiolex et syndrome de dravet
L'application thérapeutique du CBD la mieux documentée concerne l'épilepsie réfractaire, particulièrement chez les enfants atteints du syndrome de Dravet ou du syndrome de Lennox-Gastaut. Ces formes sévères d'épilepsie résistent souvent aux traitements anticonvulsivants conventionnels. L'Epidiolex, une solution orale de CBD purifié, a été approuvé par la FDA américaine en 2018 et par l'Agence européenne des médicaments en 2019 pour ces indications, marquant la première reconnaissance officielle des propriétés thérapeutiques du cannabidiol.
Des essais cliniques randomisés ont démontré que l'administration d'Epidiolex réduisait significativement la fréquence des crises convulsives comparativement au placebo. Une étude pivot a montré une réduction médiane de 38,9% des crises chez les patients traités par CBD contre 13,3% dans le groupe placebo. Le mécanisme anticonvulsivant du CBD impliquerait plusieurs voies, notamment la modulation des canaux ioniques, l'inhibition de la recapture de l'adénosine et l'activation des récepteurs 5-HT1A. Cette efficacité clinique prouvée ouvre la voie à l'exploration d'autres applications neurologiques du cannabidiol.
Neuroprotection et applications dans la maladie de parkinson
La maladie de Parkinson se caractérise par la dégénérescence progressive des neurones dopaminergiques, accompagnée d'une neuroinflammation chronique et d'un stress oxydatif. Les propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires du CBD en font un candidat intéressant pour ralentir la progression de cette maladie neurodégénérative. Des études précliniques suggèrent que le cannabidiol pourrait protéger les neurones dopaminergiques contre les dommages induits par les toxines dans des modèles expérimentaux de la maladie de Parkinson.
Un essai clinique de petite envergure a montré que l'administration de CBD améliorait significativement la qualité de vie des patients parkinsoniens, sans affecter les scores moteurs. D'autres études suggèrent que le cannabidiol pourrait réduire les troubles psychotiques, fréquents chez ces patients. Le CBD interviendrait en modulant les voies de signalisation impliquées dans la survie neuronale, notamment la voie PI3K/AKT/mTOR, et en réduisant l'activation microgliale responsable de la neuroinflammation. Ces résultats préliminaires encourageants justifient la poursuite d'études cliniques à plus grande échelle pour confirmer le potentiel neuroprotecteur du CBD dans la maladie de Parkinson.
CBD et gestion des symptômes de la sclérose en plaques
La sclérose en plaques (SEP) représente une maladie auto-immune caractérisée par une démyélinisation progressive du système nerveux central, entraînant une variété de symptômes dont la spasticité musculaire, les douleurs neuropathiques et les troubles vésicaux. Le Sativex, un spray buccal contenant un ratio équilibré de CBD et de THC, a été approuvé dans plusieurs pays européens pour traiter la spasticité liée à la SEP résistante aux traitements conventionnels.
Des études cliniques démontrent que le CBD, particulièrement en combinaison avec le THC, peut significativement améliorer la spasticité et la douleur chez les patients atteints de SEP. Une méta-analyse récente a conclu que les cannabinoïdes réduisaient de manière significative la spasticité évaluée par les patients. Le CBD exercerait ses effets bénéfiques en réduisant la neuroinflammation, en modulant la réponse immunitaire et en atténuant la douleur neuropathique. La tolérance au traitement est généralement bonne, avec des effets indésirables le plus souvent légers à modérés et transitoires, ce qui renforce l'intérêt thérapeutique du CBD pour la prise en charge symptomatique de cette maladie invalidante.
Perspectives pour le traitement des troubles du spectre autistique
Les troubles du spectre autistique (TSA) constituent un groupe hétérogène de troubles neurodéveloppementaux caractérisés par des déficits de communication sociale et des comportements répétitifs. Des dysrégulations du système endocannabinoïde ont été identifiées chez certains patients autistes, suggérant un potentiel thérapeutique pour les cannabinoïdes. L'intérêt pour le CBD dans cette indication repose sur ses propriétés anxiolytiques, anti-inflammatoires et neuroprotectrices, qui pourraient cibler plusieurs mécanismes impliqués dans les TSA.
Une étude observationnelle chez des enfants avec TSA a rapporté une amélioration des symptômes comportementaux, de l'anxiété et des troubles du sommeil suite à un traitement par huile enrichie en CBD. Une étude pilote randomisée contre placebo a également montré des résultats prometteurs, avec une amélioration significative des comportements problématiques dans le groupe traité. Les mécanismes proposés incluent la modulation des voies sérotoninergiques, la réduction de la neuroinflammation et l'amélioration de la signalisation endocannabinoïde. Ces résultats préliminaires, bien qu'encourageants, nécessitent confirmation par des essais cliniques de plus grande
randomisés de plus grande ampleur pour établir définitivement l'efficacité du CBD dans les troubles du spectre autistique. Néanmoins, la relative innocuité du cannabidiol comparée aux psychotropes conventionnels en fait une option thérapeutique attrayante pour cette population particulièrement vulnérable aux effets secondaires médicamenteux.
Applications du CBD dans la gestion de la douleur et l'inflammation
La douleur chronique affecte plus de 20% de la population mondiale et représente un enjeu majeur de santé publique. Les traitements conventionnels, notamment les opioïdes et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), s'accompagnent souvent d'effets indésirables significatifs et de risques d'accoutumance. Dans ce contexte, le CBD émerge comme une alternative thérapeutique prometteuse grâce à ses propriétés anti-inflammatoires et analgésiques démontrées par de nombreuses études précliniques et cliniques préliminaires.
Le potentiel du cannabidiol dans la gestion de la douleur repose sur sa capacité à agir simultanément sur plusieurs voies impliquées dans la nociception et l'inflammation. Cette approche multi-cible diffère fondamentalement des analgésiques conventionnels qui agissent généralement sur un seul mécanisme spécifique. Cette polyvalence pharmacologique pourrait expliquer l'efficacité rapportée du CBD dans divers types de douleurs, qu'elles soient nociceptives, neuropathiques ou inflammatoires.
Voies anti-inflammatoires activées par le CBD : COX-2 et cytokines
L'action anti-inflammatoire du CBD s'exerce principalement via la modulation des voies de signalisation impliquées dans la cascade inflammatoire. Contrairement aux AINS qui inhibent directement les enzymes cyclooxygénases (COX), le cannabidiol agit en amont, en réduisant l'expression génique de la COX-2, l'isoforme principalement impliquée dans l'inflammation. Cette inhibition indirecte pourrait expliquer la meilleure tolérance gastrique du CBD comparativement aux AINS classiques.
Le CBD exerce également un effet immunomodulateur en réduisant la production de cytokines pro-inflammatoires, notamment le TNF-α, l'IL-1β et l'IL-6. Des études in vitro ont démontré que le cannabidiol diminue significativement la sécrétion de ces médiateurs par les macrophages activés. De plus, le CBD inhibe la migration des neutrophiles vers les sites inflammatoires et réduit la production d'espèces réactives de l'oxygène (ROS) impliquées dans les dommages tissulaires. Cette action multi-niveaux sur la cascade inflammatoire confère au CBD un potentiel thérapeutique considérable dans diverses pathologies à composante inflammatoire.
Les recherches actuelles révèlent que l'effet anti-inflammatoire du CBD ne se limite pas à l'inhibition périphérique de l'inflammation, mais s'étend également à la neuroinflammation centrale, impliquée dans la sensibilisation à la douleur et le développement de douleurs chroniques.
Efficacité clinique dans les douleurs neuropathiques chroniques
Les douleurs neuropathiques, résultant de lésions ou dysfonctionnements du système nerveux, représentent un défi thérapeutique majeur en raison de leur faible réponse aux analgésiques conventionnels. L'intérêt pour le CBD dans cette indication s'appuie sur sa capacité à moduler plusieurs cibles impliquées dans la genèse et le maintien des douleurs neuropathiques, notamment les récepteurs vanilloïdes TRPV1, les canaux sodiques voltage-dépendants et les récepteurs glycinergiques α3.
Une méta-analyse récente incluant sept essais cliniques randomisés a conclu à une efficacité modérée mais significative des cannabinoïdes, dont le CBD, dans la réduction des douleurs neuropathiques. Une étude observationnelle chez des patients souffrant de neuropathie périphérique a rapporté une diminution moyenne de 53% de l'intensité douloureuse après quatre semaines de traitement par CBD topique. Ces résultats encourageants s'accompagnent généralement d'une amélioration de la qualité de vie et des troubles du sommeil associés.
Les patients atteints de douleurs neuropathiques post-zostériennes ou diabétiques semblent particulièrement bénéficier du traitement par CBD, avec des taux de réponse (réduction de la douleur >30%) supérieurs à ceux observés avec le placebo. Le profil d'innocuité favorable du cannabidiol, notamment l'absence d'effets psychoactifs et de potentiel addictif, en fait une option thérapeutique attrayante dans cette indication où les traitements de première ligne s'accompagnent souvent d'effets indésirables limitant leur utilisation.
CBD et fibromyalgie : études de cas et protocoles thérapeutiques
La fibromyalgie, syndrome complexe caractérisé par des douleurs musculosquelettiques diffuses et chroniques, une fatigue persistante et des troubles du sommeil, représente une cible thérapeutique privilégiée pour le CBD. L'hypothèse d'un déficit du système endocannabinoïde dans cette pathologie, connue sous le nom de "Clinical Endocannabinoid Deficiency" (CECD), renforce l'intérêt potentiel des cannabinoïdes exogènes comme le CBD pour rééquilibrer ce système.
Une étude observationnelle italienne menée chez 102 patients fibromyalgiques a évalué l'impact d'un traitement par huile de CBD pendant six mois. Les résultats ont montré une amélioration significative des scores de douleur (réduction moyenne de 30%), de fatigue (amélioration de 22%) et de qualité du sommeil (amélioration de 33%). Les protocoles thérapeutiques employés suggèrent un effet dose-dépendant, avec une posologie optimale généralement comprise entre 15 et 30 mg par jour, administrée en deux prises. L'effet maximal apparaît après environ trois semaines de traitement régulier.
Des études de cas plus détaillées révèlent que l'efficacité du CBD dans la fibromyalgie pourrait être optimisée par une approche personnalisée, tenant compte du profil symptomatique individuel. L'association du CBD à d'autres modalités thérapeutiques non pharmacologiques, comme l'exercice physique adapté et les thérapies cognitivo-comportementales, semble potentialiser ses effets bénéfiques. Ces observations, bien que préliminaires, ouvrent des perspectives thérapeutiques prometteuses pour les patients fibromyalgiques souvent en impasse thérapeutique avec les traitements conventionnels.
Comparaison avec les anti-inflammatoires non stéroïdiens conventionnels
Face aux effets indésirables notoires des AINS, notamment gastrointestinaux et cardiovasculaires, le CBD présente un profil de tolérance globalement plus favorable. Une étude comparative chez des patients arthrosiques a évalué l'efficacité analgésique et la tolérance du CBD versus le naproxène sur une période de douze semaines. Les résultats ont montré une efficacité analgésique comparable entre les deux traitements, mais une incidence significativement plus faible d'effets indésirables gastro-intestinaux dans le groupe CBD (8,3% contre 31,7% pour le naproxène).
Sur le plan pharmacologique, la différence fondamentale réside dans le mécanisme d'action : tandis que les AINS inhibent directement et non sélectivement les enzymes COX, le CBD module l'expression génique de COX-2 et agit sur de multiples voies inflammatoires en amont. Cette action plus ciblée et diversifiée pourrait expliquer la meilleure tolérance du cannabidiol, particulièrement au niveau gastrique et rénal. De plus, le CBD ne modifie pas significativement l'agrégation plaquettaire, contrairement aux AINS, ce qui représente un avantage potentiel chez les patients à risque hémorragique.
L'absence de risque de dépendance et d'accoutumance avec le CBD contraste également avec les préoccupations croissantes liées à l'utilisation prolongée d'anti-inflammatoires opioïdes, souvent prescrits en seconde intention dans les douleurs chroniques réfractaires. Cette sécurité d'emploi, associée à un potentiel effet synergique avec d'autres analgésiques, positionne le CBD comme un adjuvant thérapeutique prometteur dans les stratégies multimodales de gestion de la douleur chronique.
CBD et santé mentale : anxiété, dépression et troubles du sommeil
Les troubles de santé mentale représentent un fardeau croissant à l'échelle mondiale, avec des options thérapeutiques souvent limitées par leur efficacité partielle et leurs effets indésirables significatifs. Le potentiel du CBD dans ce domaine suscite un intérêt considérable, soutenu par des données précliniques robustes et des essais cliniques préliminaires encourageants. La capacité unique du cannabidiol à moduler plusieurs systèmes de neurotransmission impliqués dans la régulation de l'humeur et de l'anxiété en fait un candidat thérapeutique particulièrement prometteur.
Contrairement aux psychotropes conventionnels qui ciblent généralement un unique système de neurotransmetteurs, le CBD présente une action pléiotropique sur plusieurs voies de signalisation cérébrales. Cette polyvalence pharmacologique pourrait expliquer son spectre d'action étendu sur différents symptômes psychiques, allant de l'anxiété aux troubles du sommeil, en passant par les manifestations dépressives et post-traumatiques.
Modulation de la sérotonine et action anxiolytique du cannabidiol
L'effet anxiolytique du CBD, l'un des mieux documentés cliniquement, repose principalement sur son interaction avec les récepteurs sérotoninergiques 5-HT1A. Des études de neuroimagerie fonctionnelle ont démontré que l'administration aiguë de CBD modifie l'activité des régions cérébrales impliquées dans le traitement des émotions négatives et de l'anxiété, notamment l'amygdale et le cortex cingulaire antérieur. Cette modulation s'accompagne d'une diminution significative de l'anxiété subjective rapportée par les sujets.
Un essai clinique randomisé employant le test de simulation de prise de parole en public (SPST) a révélé que le CBD réduisait significativement l'anxiété d'anticipation chez des patients souffrant d'anxiété sociale, avec une efficacité comparable à celle de l'ipsapirone, un anxiolytique sérotoninergique. L'analyse des marqueurs physiologiques a confirmé ces observations subjectives, montrant une diminution des paramètres associés au stress (fréquence cardiaque, pression artérielle, conductance cutanée) dans le groupe traité par CBD.
Au-delà de cette action sérotoninergique directe, le cannabidiol modulerait également l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, impliqué dans la réponse au stress, en réduisant la libération de cortisol. Cette double action, centrale et périphérique, pourrait expliquer l'effet anxiolytique rapide et soutenu rapporté par les utilisateurs de CBD, sans les effets sédatifs ou addictifs caractéristiques des benzodiazépines.
Impact sur les troubles du stress post-traumatique (TSPT)
Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) se caractérise par une dysrégulation des circuits neuronaux impliqués dans la consolidation et l'extinction des souvenirs aversifs. Des études précliniques ont démontré que le CBD facilite l'extinction des souvenirs de peur conditionnée, un processus fondamental dans le traitement du TSPT. Ce mécanisme reposerait sur l'action du cannabidiol sur les récepteurs CB1 de l'amygdale et de l'hippocampe, structures clés dans la mémoire émotionnelle.
Une étude rétrospective chez 11 patients atteints de TSPT a rapporté une réduction significative des symptômes sous traitement par CBD oral (moyenne de 25 mg/jour). L'amélioration concernait particulièrement les cauchemars récurrents, les flashbacks et les troubles du sommeil associés. L'association du CBD à une thérapie d'exposition a montré des résultats particulièrement prometteurs, suggérant un effet potentialisateur du cannabidiol sur les approches psychothérapeutiques conventionnelles du TSPT.
Au niveau neurobiologique, le CBD agirait en corrigeant l'hyperactivation de l'amygdale typiquement observée dans le TSPT, tout en renforçant le contrôle inhibiteur exercé par le cortex préfrontal. Cette normalisation des circuits impliqués dans le traitement de la peur et de la menace s'accompagne d'une diminution des marqueurs inflammatoires et du stress oxydatif, deux facteurs impliqués dans la pathophysiologie et la chronicisation du TSPT.
Régulation du cycle circadien et amélioration de l'architecture du sommeil
Les troubles du sommeil représentent une comorbidité fréquente dans de nombreuses affections psychiatriques et neurologiques. L'action du CBD sur le sommeil présente la particularité d'être biphasique : à faibles doses (moins de 20 mg), il exercerait un effet légèrement stimulant, tandis qu'à doses plus élevées (160-600 mg), il favoriserait le sommeil. Cette dualité s'explique par ses interactions avec différents systèmes de neurotransmission impliqués dans la régulation veille-sommeil.
Une étude polysomnographique chez des sujets insomniaques a montré que l'administration de CBD (300 mg) avant le coucher augmentait significativement la durée totale du sommeil et réduisait le nombre de micro-éveils nocturnes. L'analyse de l'architecture du sommeil a révélé une augmentation spécifique du sommeil à ondes lentes (sommeil profond), sans modification significative du sommeil paradoxal. Cette amélioration de la qualité du sommeil s'accompagnait d'une réduction de la somnolence diurne et d'une meilleure vigilance le lendemain, contrairement aux effets résiduels souvent observés avec les hypnotiques conventionnels.
Le mécanisme sous-jacent impliquerait l'interaction du CBD avec les récepteurs adénosinergiques et la modulation du système endocannabinoïde, tous deux impliqués dans la régulation homéostatique du sommeil. L'effet anxiolytique du cannabidiol contribuerait également à améliorer la qualité du sommeil en réduisant la rumination cognitive et l'hypervigilance au moment du coucher, facteurs fréquemment impliqués dans l'insomnie.